Poésie : apprendre, un risque à prendre.
Connaître les fossiles permet de mieux comprendre les organismes actuels.
Connaître le latin permet de mieux manier la langue française.
Connaître les formes du passé permet de mieux percevoir l'originalité quand nous la rencontrons.
Mais connaître n'est pas créer.
Et l'art est création.
Cependant, peut-on croire que la connaissance va réfréner la créativité ? Pour ma part, je pense que c'est tout le contraire. A mon avis, à ne pas apprendre du passé, on peut reproduire ce qui a été fait, marcher sur des traces par manque de savoir, prendre pour de l'original ce qui ne l'est pas (un peu comme de trouver le packaging de studio line de L'Oréal trop génial parce qu'on ne connaît pas Mondrian).
Je suis persuadée que la culture par imprégnation est très importante mais je ne crois en aucune façon qu'elle soit suffisante si on a une quête de dépassement (un peu comme si un chercheur en biochimie ne connaissait pas les travaux du passé ni même le tableau des éléments). Sans base, je ne crois pas qu'on peut construire.
Et même si trop apprendre pouvait restreindre la créativité, j'estime, pour ma part, ce risque nécessaire : pour s'élever tout simplement (comme un violoniste fait ses gammes, un sculpteur connaît les techniques de Michel-Ange, un peintre voit ce qu'est le pointillisme....).
Il me paraît tout de même toujours incroyable d'imaginer que la poésie est un art qui se passe d'apprentissage. Ce serait donc le seul art qui s’en passe ? Certes, il faut s'imprégner du monde et le vécu doit rejaillir dans nos créations, c'est une évidence. Ceci est aussi valable dans tous les arts. Mais, il faut cesser d’opposer la connaissance le savoir et la connaissance de la vie. Je pense que ces valeurs sont complémentaires pour s'élever, s'exprimer, créer un passage vers les suivants.
Pour moi, l'art n'est qu'un passage. Connaître les tunnels d'antan évite de creuser des impasses et permet de continuer dans le labyrinthe, les yeux ouverts.